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Rayon huile en grande distribution

5 tendances actuelles qui montrent que le monde de la grande distribution est (encore) en train de changer

Au sortir de la crise, la vision était pourtant claire. Le monde d’avant serait définitivement révolu pour laisser place à un monde d’après plus digital et avec de nouveaux modes de consommation. Ce n'est pas tout à fait ce qui se passe en ce moment.

Jonathan Le Borgne
Jonathan Le Borgne

Bien malin celui qui saura prédire où va le monde de la consommation. En effet, la crise sanitaire, sous couvert d’un contexte géopolitique tendu, semble avoir des conséquences long terme que personne n’avait réellement vu venir. Depuis 2-3 mois, les pénuries, l’inflation, le manque de personnel guettent et ont de quoi alimenter les discussions dans un secteur déjà en chantier et pas vraiment épargnés ces 2 dernières années.

Et donc, où allons-nous ? Des achats de paniques, à l’éclatement de la bulle autour du Quick Commerce en passant par les tensions sur l’emploi, le secteur vit une drôle de période. Et les consommateurs aussi.

Voici les grandes lignes d’un changement profond du secteur de la grande distribution et de la grande consommation.

Les pénuries entrainent des tensions sur les chaînes d’approvisionnement et provoquent des achats de paniques

Le riz, les pâtes et le papier toilette ont été les stars des rayons durant la crise sanitaire. Considérés comme des achats de première nécessité, les consommateurs se sont jetés sur les stocks par peur de manquer.

2 ans après, le réflexe n’a pas changé. Pire. À la moindre information, cela provoque des mouvements de panique, dans lesquels les clients se jettent éperdument sur les produits qui pourraient venir à manquer. En cause, la peur de manquer bien sûr, la peur de voir les prix grimper parviennent à faire bouger les foules.

Ainsi, l’huile a été en première ligne, provoquant de fortes tensions dans la chaîne d’approvisionnement.

Aujourd’hui c’est au tour de la moutarde, peut-être même du lait (pour les mêmes raisons), et le beurre qui pourraient manquer dans les rayons. Certains diront que l’Ukraine a bon dos…

Multiplication des actions marketing pour fidéliser les consommateurs.

Face à la hausse des prix, les enseignes multiplient les opérations de communication : « bouclier anti-inflation » chez E.Leclerc, « pack pouvoir d’achat » chez Casino, « communication contre la vie chère » pour Intermarché afin d’attirer dans leur filet des consommateurs toujours plus attentifs aux prix.

Mais la communication c’est bien, faire baisser la note en bas du ticket de caisse c’est mieux. Pour cela, les actions se multiplient pour retenir les consommateurs.

En local, les magasins misent sur des leviers marketing pour retenir au maximum les clients volatils : campagne de communication pour télécharger l’application, campagne d’opt-in en caisse pour créer des cartes de fidélité figurent en tête de liste des initiatives en magasin.

Au national, chez les enseignes intégrées, c’est l’abonnement qui est de rigueur. Ainsi :

  • Casino lance Casino Max, un abonnement à 30 euros par an à destination des séniors permettant de profiter de 10% de réduction sur l’ensemble des produits ;
  • Carrefour propose un abonnement « Carrefour + quotidien » à 5,99 euros par mois offrant jusqu’à 15 % de réduction sur les produits de la marque distributeurs ;
  • Lidl invite au téléchargement de l’application Lidl+ qui permet de bénéficier de 5 % de réduction sur l’ensemble de ses courses

Des tactiques pas anodines pour fidéliser des clients toujours plus enclins d’aller voir si les prix sont plus bas ailleurs.

Baisse des achats du bio et banalisation des labels

Les ventes de produits bio ont chuté ces derniers mois. Aveuglée par une fréquentation en hausse dans les magasins entre 2020 et 2021, la tendance a fini par montrer des signes de décroissance. Le chiffre d'affaires du bio a en effet dégringolé de 6,6% au premier trimestre 2022 par rapport à la même période l'année précédente. Même constat chiffré avec IRI qui atteste d’une baisse des dépenses dans les enseignes spécialisées de 4,9% au premier trimestre 2022.

En cause : un surréférencement par rapport à la demande (le bio c’est 8% des références dans les magasins, mais ne représente que 5% du chiffre d'affaires) et une demande qui n’est plus au rendez-vous.

Et aussi une perte de confiance envers les labels. À trop inonder les consommateurs d’informations, ils ont fini par se noyer.

Tensions sur l’emploi

On parle beaucoup des restaurateurs et de leurs difficultés à recruter, mais la situation est sensiblement la même dans les magasins.

« La question se pose d’année en année, mais celle-ci est la plus difficile sur le recrutement », explique ici ce directeur. Comme lui d’autres magasins peinent à recruter, tous profils et tous contrats confondus : « chez nous, nos avons recruté plusieurs profils très jeunes, mais qui ont abandonné très vite. Le rythme soutenu, l’absence de communication… ça ne leur donne pas très envie de rester à ces jeunes », regrette même cette manager.

Depuis la crise sanitaire, « la tendance a changé les employeurs vont à la rencontre des employés et non plus l'inverse », explique ce manager, « on sent un désintérêt pour la grande distribution, mais pour le monde du travail au sens large. Le pire c’est qu’on reçoit des candidats, et certains de ceux qui sont retenus ne se présentent pas dès le premier jour et sans prévenir bien sûr », déplore-t-il.

En magasin, comme dans d’autres secteurs (restauration, santé, hôtellerie), le manque de personnel pourrait pertuber le fonctionnement des entreprises.

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Le Quick Commerce au bord de l’implosion

Victimes collatérales du changement de comportement des consommateurs, le Quick Commerce, porté par des starts-up comme Gorillas ou Getir, ne tient pas finalement tête aux gigantesques levées de fond. En effet, les services de livraison rapide - dont la promesse allait jusqu’à 10 minutes de la commande au pas de porte du client - fini par s’essouffler au point de devoir licencier à tour de bras. Au total, des milliers d’emplois disparaissent.

Pourtant très agressifs sur le plan de la communication, les starts-up peinent à fidéliser les consommateurs sur le seul argument de la vitesse de livraison. Les ménages étant déjà soumis à une forte pression sur le pouvoir d’achat, il devenait compliqué de faire payer des consommateurs pour un service dont ils peuvent se passer.

Cela étant, il y aura toujours des gens pour payer leurs services, mais le marché risque de vaciller dans les prochains. Ces acteurs n’auront d’autres choix que de négocier des partenariats avec les enseignes comme c’est déjà le cas du côté de Carrefour de Casino.

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Jonathan Le Borgne Twitter

Éditeur de Je Bosse en Grande Distribution. Passionné par la transition numérique des entreprises. Consultant, formateur et stratège en communication digitale pour la grande distribution.

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