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« C'est apaisant ! » : au Super U de Mordelles, les heures calmes c'est 4 fois par semaine

Pas de musique d’ambiance. Dès l’entrée, on entend la différence.

Jonathan Le Borgne
Jonathan Le Borgne

Propos recueillis par Solenne Durox.

Cela fait deux ans que le dispositif est mis en place dans le magasin, au bénéfice des personnes présentant des troubles du spectre de l’autisme mais pas seulement. A raison de quatre fois par semaine, ce changement organisationnel influe également sur le bien-être des salariés qui ont appris à s’y adapter.

Depuis décembre 2019, le Super U de Mordelles met en place des heures calmes comme 1600 autres points de vente en France. Imaginé au départ pour mieux recevoir les personnes présentant des troubles du spectre de l’autisme (TSA), le dispositif a d’abord testé sur une journée.

Fort des retours positifs de ses clients, bien au-delà de la cible initiale, il a été étendu à quatre journées dans le supermarché bretillien. « Ce sont nos clients qui nous ont demandé d’élargir les créneaux. Nous sommes peu de magasins à le faire sur quatre jours », précise Arnaud Porcher, le directeur du Super U.

Ainsi, de 13h30 à 15h30, du lundi au jeudi, l’ambiance sonore et lumineuse se fait donc discrète. Le volume des bips des scanners en caisse est baissé. Une rampe d’éclairage sur eux est éteinte : « nous ne faisons pas d’annonces au micro, même si quelqu’un est mal garé, explique Sylvie, hôtesse d’accueil. Si on doit contacter un employé, on ne l’appelle pas au micro, on va le chercher. On essaye aussi de laisser sonner le moins longtemps possible le téléphone ». Le personnel est également invité à réduire le volume de leurs smartphones : « au début, il a fallu expliquer la démarche aux clients mais cela a vite été accepté », observe un agent de sécurité.

Au rayon livres, Céline, 40 ans, cherche son bonheur dans une pile d’ouvrages. Comme beaucoup de clientes cet après-midi là, elle n’a pas fait le choix de venir spécifiquement sur ce créneau d’heures calmes. Elle n’est pas non plus concernée par les troubles autistiques. Pour autant, elle apprécie. « Je trouve cela apaisant », remarque-t-elle avant d’ajouter qu’une de ses amies n’est pas du même avis. « Elle pense que c’est un peu glauque et triste ».

« Ça fait du bien aux oreilles »

Si les heures calmes ont été originellement mises en place au bénéfice des clients, elles ont aussi changé la manière de travailler des employés. Au rayon bazar, Nathalie est très enthousiaste :  « j’adore! D’habitude, on est toujours dans un brouhaha. Là, ça fait du bien aux oreilles. Quand on parle avec des clients, on s’entend mieux ».

Sylvie, à l’accueil, va dans le même sens. « C’est vraiment reposant pour les yeux. Il y a trop de lumière en général ». Au rayon culture, Valentin, lui, est plus nuancé. « Au départ, j’aimais bien mais la musique me manque désormais ».

La gestion du flux lumineux a donné de quoi réfléchir à la direction. « Il faut jongler entre la nécessité de mettre en valeur nos produits et celle de limiter la surconsommation d’énergie », souligne Arnaud Porcher. Ce dernier rappelle aussi qu’il n’est pas toujours aisé de « réussir à respecter ce qu’on met en place. Le moindre bruit est en effet exacerbé dans le silence ». Une petite fille en apporte justement la preuve au rayon boissons en criant après sa mère pour lui réclamer un soda. Du côté des produits d’hygiène, deux écrans passant en boucle des spots promotionnels sont apparemment passés entre les mailles du filet. Ils continuent à délivrer bruyamment leurs messages publicitaires. Assise sur son auto-laveuse, l’agente de propreté slalome d’allée en allée. Grâce au bruit de la machine, on l’entend arriver de très loin. « Pas le choix, ce sont les horaires auxquels je travaille », explique-t-elle. Arnaud Porcher le reconnaît, l’équation n’est pas toujours simple à résoudre. D’un côté, la nécessité de réduire les nuisances, notamment sonores. Et de l’autre celle de conserver une organisation efficace. « Cela peut créer des problèmes si on demande aux personnes de travailler en décalage. Quand on fait intervenir un ouvrier pour des travaux, par exemple, il y a moins de créneaux disponibles ».

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Un dispositif testé avec succès a l’étranger : La grande distribution française s’est inspirée de ce qui existe déjà à l’étranger depuis quelques années, notamment au Royaume-Uni, en Australie, Nouvelle-Zélande ou aux Pays-Bas. Au Royaume-Uni, dès avril 2017, le groupe Tesco a conduit une expérimentation dans l’un de ses magasins du Sussex. L’heure silencieuse était accompagnée d’autres adaptations facilitant l’inclusion des personnes présentant des TSA : files spécifiquement réservées, personnel aidant à l’emballage des courses lors du passage en caisse, suspension des activités de remplissage des étagères dans les rayons, maintien permanent des portes automatiques ouvertes, installation de pictogrammes visuels en tête de gondole, etc.
Avec le soutien de l'ADEME dans le cadre du plan Agir pour la Transition.
RSE

Jonathan Le Borgne Twitter

Éditeur de Je Bosse en Grande Distribution. Passionné par la transition numérique des entreprises. Consultant, formateur et stratège en communication digitale pour la grande distribution.

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