Dans ce nouvel épisode, Philippe Rovira s’attaque à un sujet-clé pour tous les managers de la grande distribution : la motivation des équipes. Alors que les recrutements sont sous tension et que les attentes des collaborateurs ont profondément évolué, il partage une vision pragmatique, ancrée dans le réel, mais résolument tournée vers l’humain.
Les jeunes veulent être considérés : ça commence par l’écoute
Première alerte pour les managers : le management autoritaire ne fonctionne plus. Philippe est catégorique : « Le salarié, aujourd’hui, ne veut pas de management directif. Il ne supporte pas les ordres brutaux, les réflexions à chaud, les humiliations. » Il cite un exemple concret : « J’ai vu un jeune rendre sa blouse après s’être fait crier dessus dès le premier jour. Il n’est même pas revenu le lendemain. »
Pour lui, le point de départ de la motivation, c’est le regard du manager sur son collaborateur. « Les jeunes veulent être reconnus pour ce qu’ils font bien. Ils ont besoin qu’on les écoute, qu’on leur donne la parole. »
Cela passe aussi par des petites choses : un “bonjour” sincère, un remerciement pour un bon travail, une disponibilité réelle. « Si ton manager ne te regarde jamais, ne t’écoute jamais, ne sait pas qui tu es… comment veux-tu avoir envie de t’investir ? »
Donner du sens, c’est donner de la perspective
Au-delà de l’écoute, il faut donner du sens au travail. Et cela ne veut pas dire vendre un grand récit utopique. Pour Philippe Rovira, le sens, c’est expliquer pourquoi on fait les choses, même les plus simples.
« Si je demande à quelqu’un de remettre les cagettes droites, je dois lui dire pourquoi. Parce que c’est plus fluide pour le client, parce que c’est plus agréable visuellement, parce que c’est plus sécurisant. »
Il souligne aussi l’importance de projeter les collaborateurs dans une trajectoire. « Un salarié motivé, c’est quelqu’un qui voit qu’il peut évoluer, apprendre, s’impliquer. » Et cela ne demande pas toujours une fiche de poste formelle : « Donner une mini-mission, comme suivre un produit ou organiser une mise en avant, c’est déjà responsabiliser. »
L’argent ne suffit pas (même s’il compte)
Philippe ne nie pas que la rémunération joue un rôle : « Le salaire reste un facteur de motivation. Il faut être cohérent avec le marché, respecter les engagements, proposer des primes claires. » Mais il insiste : ce n’est pas le moteur principal.
« Un salarié bien payé mais mal managé partira. Un salarié qui se sent utile, reconnu, intégré, restera, même si l’offre d’en face est 50 € plus haute. » Pour lui, la clé est dans l’environnement de travail : l’ambiance, la clarté, la considération, la communication.
Éviter les erreurs classiques : la démotivation par négligence
Certaines pratiques sont encore courantes… et contre-productives. Philippe les énumère sans détour :
- Ne pas former correctement les nouveaux arrivants : « Si tu laisses un nouveau livré à lui-même dès le premier jour, il perd confiance immédiatement. »
- Critiquer en public : « Il faut apprendre à dire les choses, mais au bon moment, au bon endroit. »
- Promettre sans tenir : « Une promesse non tenue, même petite, peut casser toute relation de confiance. »
Il insiste aussi sur un point souvent négligé : le manque de feedback positif. « On pense à dire ce qui ne va pas, mais on oublie de valoriser ce qui est bien. Or un salarié a besoin de savoir qu’il est sur le bon chemin. »
Créer un climat d’équipe : le rôle du manager fédérateur
La motivation ne se joue pas qu’en tête-à-tête. Elle passe aussi par l’ambiance collective. Et là encore, le manager a un rôle central. « Une équipe qui rigole, qui s’entraide, qui prend des pauses ensemble, ça change tout. »
Il encourage les managers à créer des rituels simples : un brief le matin, un point rapide en fin de journée, des moments de partage. « C’est dans ces moments-là qu’on crée du lien. »
Il partage une anecdote révélatrice : « J’ai connu un manager qui apportait des viennoiseries le samedi matin. Rien d’obligatoire, rien de formel. Juste un geste. Et son équipe était toujours là à l’heure, avec le sourire. »
Dans un métier exigeant comme celui de chef de rayon, la motivation est une ressource fragile, mais essentielle. Philippe Rovira le résume ainsi : « On n’est pas des robots. On a besoin d’attention, de reconnaissance, d’évolution. Le manager qui comprend ça transforme son équipe. »
Il rappelle que motiver, ce n’est pas manipuler. C’est créer les conditions dans lesquelles chacun a envie de donner le meilleur de lui-même. Et cela commence par une posture managériale claire : humaine, cohérente, à l’écoute.
Dans un secteur en tension, où le turnover peut faire vaciller un rayon entier, le manager est plus que jamais le premier levier de stabilité et de performance.