Les consignes réutilisables en grande surface sont devenues une pratique de plus en plus utilisée afin de collecter les contenants recyclables et lutter contre les déchets. Les enseignes de la grande distribution, qui tentent de multiplier les actions en faveur de l’économie circulaire, commencent à explorer cette piste qui semblait pourtant se limiter aux commerces de proximité. Avec succès ? Réponse dans cet article.
Cap sur la lutte contre le gaspillage
Bien que les chiffres varient d’une étude à l’autre, il est admis qu’un Français jette en moyenne entre 50 et 70 kg de déchets plastiques par an. Une grande partie de ces déchets étant issue des produits achetés en grande distribution, il paraît évident qu’il y a ici une vraie marge de progression en matière de recyclabilité.
C’est pourquoi la consigne est de plus en plus vue comme une solution afin d’améliorer nos pratiques environnementales quotidiennes. Déjà très présente dans les magasins bio et dits « de proximité », la consigne fait un retour remarqué en grande distribution et dans les supermarchés. Cette pratique consiste à inclure au prix de vente de chaque produit un petit supplément lié au contenant.
Une fois le produit consommé ou utilisé, il suffit de rincer le contenant et de le rapporter en magasin pour récupérer l’argent de départ, voire de bénéficier d’un petit supplément sous forme d’avoir à utiliser en magasin.
Coup de projecteur sur les consignes
Ce système, qui est déjà obligatoire chez nos voisins allemands depuis 2006 pour certains produits, a bénéficié d’un coup de projecteur en février dernier sur notre territoire. Des activistes de l’association Zéro Waste ont mené en février dernier des expéditions coups de poing dans plusieurs grandes enseignes françaises (Super U, Carrefour, Auchan…) en mettant des emballages en verre vide à côté des contenants pleins, et en y écrivant dessus « Consignez-moi ». Une action poursuivie sur les réseaux sociaux avec le #consignezmoi.
Cette initiative tombait à point nommé, alors que le gouvernement organisait fin janvier une concertation sur la mise en place d'une consigne sur les emballages - à laquelle étaient invitées les grandes enseignes - afin de réduire leur impact environnemental. Ces dernières sont sur le principe toutes favorables à la consigne car elle va dans le sens d’une politique de Zéro déchet et leur permettrait aussi d’être plus facilement éligibles au nouveau label anti-gaspillage.
Il s’agit aussi de répondre aux exigences de la loi anti-gaspillage et pour une économie circulaire, dite loi AGEC. Pour rappel, celle-ci va interdire progressivement l’utilisation du plastique à usage unique, avec un objectif de zéro à l’horizon 2040.
Les actions des enseignes en faveur des consignes
Le législateur n'ayant pas encore déterminé de cadre réglementaire incitant à agir, le déploiement d'un système de consigne varie ainsi d'une enseigne à une autre. Depuis 2019, Leclerc a déployé un système d'automates de récupération de bouteilles en plastique dans une centaine d'hypermarchés d'Île-de-France, d'Occitanie et de Nouvelle-Aquitaine.
Les clients peuvent revenir en magasin pour ramener leurs bouteilles et les insérer dans une machine qui procède au tri et au comptage de ces bouteilles. Il ne s'agit pas à proprement parler d'un système de consigne classique. Les bouteilles sont en effet envoyées dans des centres de recyclage pour être traitées et pas forcément réutilisées, mais le consommateur qui ramène le contenant est gratifié de quelques centimes d'euros sur sa carte fidélité. C'est un système incitatif.
C'est l'entreprise norvégienne Tomra, devenue aujourd'hui l'un des leaders mondiaux du recyclage, qui a conçu ces automates. Ils sont aujourd'hui déployés dans certains supermarchés de l'enseigne Leclerc, mais également chez Super U, Intermarché, Carrefour et Auchan.
Autre initiative, cette fois en mode pilote dans le Leclerc Granville Chausey. Elle a lieu en collaboration avec la société « Suivez la consigne ». Les clients peuvent rapporter leurs bouteilles dans l’automate créé par cette startup, lequel se trouve dans la galerie du magasin. Ils gagnent ainsi 5 centimes d’euros par bouteille sous forme de bon d’achat. Ces dernières sont ensuite lavées afin d'être réutilisées jusqu’à une vingtaine de fois si le verre n’est pas abîmé.
Carrefour et le dispositif Loop
Fin 2020, Carrefour a lancé ses premiers produits consignés en région parisienne, avant de l'étendre progressivement dans l'est et l'ouest de la France. Sous l'appellation « Loop par Carrefour », le groupe propose la consigne sur un grand nombre de produits : sacs, bouteilles d'eau, sodas, produits alimentaires contenus dans des conserves en verre, etc. Les emballages sont triés et nettoyés, pouvant ensuite être remplis à nouveau et remis dans la boucle plusieurs dizaines de fois. Chaque retour permet au consommateur d'être directement remboursé (environ 20 centimes d'euros) à la caisse du magasin ou via virement bancaire grâce à l'application Loop.
Carrefour a établi un partenariat avec plusieurs grandes marques (Nutella, Bonduelle, Ricoré, Vittel, 1664) qui participent à ce dispositif. L'objectif étant au final d'amener un plus grand nombre d'industriels à rejoindre le projet Loop. Pour Carrefour, cette offre de consigne s'inscrit dans le cadre de son opération « Défi zéro gaspi/Défi zéro plastique ».
Le déploiement du système NoWW se développe
NoWW, acronyme de « No Waste in my World », propose aux supermarchés des emballages consignés. Comme pour les autres systèmes de consigne, les clients insèrent leur emballage en verre dans la machine NoWW et se voient rembourser en bon d’achat le prix initial de leur consigne (entre 1.50 et 2 euros).
Ce concept, expliqué en détails par sa fondatrice et CEO Laurence Payre dans une interview réalisée précédemment, est aujourd’hui déployé dans plusieurs enseignes de grande distribution à travers la France : Intermarché, Leclerc, Les Mousquetaires, ou encore Carrefour Market.
Les autres initiatives locales
Comme Carrefour, d'autres enseignes de grande distribution débutent par des initiatives locales avant un éventuel déploiement du système de consigne sur l'ensemble de leurs magasins nationaux. Parmi ces actions:
- Auchan a mis en place un système de consigne pour les bouteilles de lait en verre dans certains magasins de la région Hauts-de-France.
- Système U propose un système similaire, mais pour les bouteilles de vin en verre, pour les clients de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur.
- Intermarché a activé la consigne pour le lait en verre, principalement dans les régions Bretagne, Normandie et Pays de la Loire.
- L’Hyper U La Chapelle sur Erdre et le Super U Carquefou, tous deux situés Pays de la Loire, proposent à leurs clients un système de consigne via la société Bout’ à Bout. Cette dernière avait commencé à proposer ses services notamment auprès des enseignes Biocoop situées dans la région.
En attendant que l'État oblige l'installation d'un cadre réglementaire pour inciter les grandes enseignes à accélérer le mouvement en faveur de la consigne, ces initiatives locales préparent les consommateurs à un changement des habitudes de consommation.
Elles sont également favorables à l'environnement, car, rappelons-le, en favorisant la réutilisation des contenants, la consigne contribue aussi à réduire les émissions de gaz à effet de serre dues à la production de nouveaux contenants. Celle-ci nécessite en effet l'utilisation de matières premières, d'énergie et d'eau, ce qui émet des GES tout au long de la chaîne de production (79% de GES en plus pour la fabrication selon Citeo). En outre, la consigne réduit aussi la quantité de déchets plastiques qui polluent les océans et mettent en danger la faune marine.
Alors, si vous avez la chance d'avoir une enseigne de grande distribution vous proposant des solutions de consigne, vous savez ce qu'il vous reste à faire !