La grande distribution à l’aube de grands bouleversements : vision et perspectives

À quoi ressemblera la grande distribution de demain ?
La grande distribution à l’aube de grands bouleversements : vision et perspectives

Dans un troisième épisode (voici ici le premier et le second), nous entrouvrons avec Philippe Goetzmann les perspectives d'avenir de la grande distribution. Dans cet épisode du podcast, notre invité analyse les transformations profondes qui attendent la grande distribution. Entre nouveaux modèles économiques, fragmentation de la société et défis démographiques, cette conversation éclaire sur un avenir complexe mais riche d’opportunités.

Une transition nécessaire vers des modèles hybrides

Selon Philippe Goetzmann, la grande distribution est confrontée à un impératif de transformation. Le modèle traditionnel basé sur les économies d’échelle et la standardisation montre ses limites dans un monde de plus en plus fragmenté.

« Il y a 15 ans, aller chez Carrefour, Auchan ou Leclerc, c’était presque pareil. Aujourd’hui, les propositions se différencient, répondant à des demandes variées et spécifiques ».

La fragmentation de la société et de la demande pousse les groupes à réinventer leurs offres. « Les groupes de distribution ne seront plus mono-enseignes, mais deviendront des groupes multi-enseignes avec des concepts très différents, mutualisant leurs coûts pour rester viables ». Cela ouvre la voie à une diversification des modèles, notamment à travers des circuits alternatifs, des startups ou encore des approches locales.

Cependant, ces évolutions s’accompagnent d’un défi majeur : maintenir la rentabilité tout en diversifiant les offres. « Segmenter le marché, c’est aussi augmenter les coûts et la complexité. Cela met une pression énorme sur les marges des acteurs, qu’ils soient distributeurs, industriels ou agriculteurs ».

« Ce n’est pas les gros qui mangent les petits, mais les rapides qui mangent les lents. »

Vers un commerce « agile » et « décentralisé »

Pour répondre à ces nouveaux enjeux, l’agilité et la décentralisation deviennent essentielles.

Les organisations centralisées, face à un monde fragmenté, sont des systèmes mortifères. La chute de Casino, par exemple, est en grande partie liée à une hypercentralisation qui a déconnecté les magasins de leurs territoires ».

Philippe Goetzmann insiste sur l’importance de redonner aux magasins une autonomie et une pertinence locale.

Refaire du patron de magasin le plus beau métier qui soit, retrouver l’agilité dans les décisions, c’est ce qui permettra aux enseignes de rester compétitives. »

Il souligne également le rôle croissant des services dans la transformation des modèles économiques. « Ce n’est pas le produit qui compte, mais ce qu’il permet de réaliser. La grande distribution doit devenir un hub de services, intégrant des offres de mobilité, de restauration ou de location. Cela exige un changement de mindset colossal ».

Un avenir en mouvement : « le paysage de la distribution dans 10 ans ne ressemblera pas à celui d’aujourd’hui »

Les transformations à venir ne seront pas sans conséquences.

D’ici 10 ans, le marché de la grande consommation pourrait perdre 15 à 20 milliards d’euros. Ce n’est pas une évolution mineure : c’est l’équivalent de la taille d’un groupe comme Auchan ».

Ces bouleversements imposent une adaptation rapide pour survivre dans un environnement de plus en plus compétitif.

Ce n’est pas les gros qui mangent les petits, mais les rapides qui mangent les lents. Les entreprises capables d’intégrer ces changements seront celles qui prospéreront. »

Enfin, il appelle à une réflexion collective pour anticiper ces mutations. « Le paysage de la distribution dans 10 ans ne ressemblera pas à celui d’aujourd’hui. Ce changement est une opportunité si les acteurs savent l’aborder avec agilité, innovation et une véritable vision locale ».

Cet épisode riche en perspectives montre que la grande distribution est à un tournant décisif de son histoire. Les prochains défis, bien que complexes, ouvrent des opportunités pour réinventer un secteur clé de l’économie française.