Dans un contexte où l'avenir du prospectus s'écrit en pointillé, les enseignes, les points de vente misent sur les leviers accessibles par et pour la communication locale. L'exercice est complexe : il convient de découler une communication dictée nationalement avec des codes plus humains, plus authentiques, plus spontanés... (etc, etc) pour répondre à des objectifs convenus par le point de vente.
Car oui, chaque point de vente, selon sa région, sa cible, ses comportements clients, a des objectifs différents. Un magasin saisonnier réfléchira différemment qu'un magasin urbain ou un hypermarché situé en périphérie d'une grande ville.
Dans cet article, on revient sur les points clés pour comprendre les enjeux de la communication locale en grande distribution. Une session à écouter entièrement en podcast ou en vidéo.
La communication locale représente plus de 30% des dépenses sur le marché publicitaire du retail
Au total France, le marché publicitaire c'est aujourd'hui un marché de 33 milliards d'euros.
Dans une approche sectorielle, le secteur de la distribution en est le premier acteur avec 9 milliards d'euros en 2022 selon France Pub (en comptant les dépenses communication secteur distribution comprenant les médias propriétaires numériques (sites, applications, contenus…) .
Et si on résonne dans une approche locale, c'est-à-dire la part consacrée à la communication locale, cela représente 10 milliards d'euros : « la communication locale, historiquement, c'est une très grosse part de la communication », confirme d'ailleurs Élisabeth Cony dans notre webinar consacré aux enjeux de la communication locale en grande distribution.
Les dépenses en communication ont atteint un pic en 2019
Crise Covid oblige, le secteur de la grande distribution s'est rabattu vers des solutions digitales à un moment où la diffusion des prospectus n'était plus permise.
C'est en 2019 que le pic des dépenses en communication de la grande distribution a atteint son maximum.
Le secteur de la distribution exploite un très grand nombre de leviers de communication
La façon de communiquer en grande distribution. Quand avant les magasins se concentraient sur 3 à 4 leviers (prospectus, radio, presse locale, 4x3, abribus, etc), le digital a élargi le champ des possibles : réseaux sociaux, display, SEO/SEA, mail/SMS, les leviers ne manquent pas pour entrer en contact avec son audience.
Si bien qu'aujourd'hui, il y a autant de leviers que de scénarios à envisager. Jusqu'en 2000+, on était historiquement sur trois ou quatre médias et depuis la digitalisation amorcée aux débuts des années 2000, on a des scénarios qui vont au-delà des huit dix médias facilement.
« Le secteur de la grande distribution exploite un très grand nombre de leviers de communication. On peut parler d'une douzaine de grands leviers », complète la fondatrice de Madame Benchmark, « le marché est actuellement très dynamique avec une redistribution des cartes permanentes ».
Cette diversité de leviers « montre toute la complexité à laquelle sont confrontés les points de vente qui justement n'avaient pas besoin de faire ces arbitrages finalement, qui connaissaient leur zone de distribution de prospectus et qui pouvaient discuter avec leurs distributeurs pour savoir où diffuser, et ils passaient un temps restreint », explique ici Arnaud Longatte de Nanotera, « les magasins ressentent le besoin d'être accompagnés pour savoir vraiment en fonction de leur zone, quels sont les leviers à activer ».
Aussi, on observe en 2022 que les dépenses de promotion devancent légèrement pour la 1ère fois celles du catalogue boites aux lettres.
Pour déclencher une vente en magasin, cela passe par plusieurs points. Un utilisateur doit voir une enseigne à la radio, à la télé, sur les réseaux sociaux, en affichage, etc. Donc c'est un ensemble de choses. Rafaël Lefevre, Meta
Le print en magasin : un usage peu étudié qui regagne en intérêt
Le prospectus n'est peut-être plus distribué, il n'en suscite pas moins la convoitise. « Les présentoirs à l'accueil des magasins sont souvent vides », observe d'ailleurs Élisabeth Cony.
« J'ai mené trois études en zone Oui Pub et force est de constater que les présentoirs sont vides. Il y a encore une appétence des clients pour, s'ils n'ont plus leurs prospectus en boites aux lettres, de le retrouver en magasin s'ils ne l'ont pas retrouvé tout de suite sur le digital ».
C'est également le même constat dressé par Pierre Godineau, associé chez Super U Vertou, qui nous expliquait que le papier était encore très plébiscité en magasin.
L’évolution des dépenses de communication depuis 2018 profite au digital
Même budget, mais diversité des leviers, cela explique que le report se fasse progressivement vers de nouveaux médias. Si les médias promo traditionnels (prospectus, courriers adressés) et les médias classiques (TV, radio, presse, affichage, cinéma) reculent de respectivement -17% et -3% en 2022, ce n'est pas le cas des médias promos digitaux. Les médias numériques propriétaires, le search, le social média, le display connaissent une croissance folle dans les stratégies des enseignes. Selon France Pub, cette hausse est de l'ordre de +81%.
« On le voit vraiment dans les chiffres. La baisse des investissements catalogues, boîtes aux lettres profite au digital mais aussi à d'autres supports plus historiques comme la PMV, la radio, l'affichage au sein du digital, les enseignes. Les enseignes privilégient d'abord les supports qu'elles maitrise comme l'application, le site web, le wallet, etc. Elles achètent ensuite de la publicité digitale pour diffuser des opérations promotionnelles. Cet ensemble peut s'opérer sur un large spectre de supports au niveau local », confirme Elisabeth Cony.
Mesurer le trafic en magasin grâce au digital, c'est un « fantasme »
Pour clarifier les idées reçues, les effets de la communication locale sur le point de vente sont difficiles à mesurer : « c'est un fantasme », énonce d'ailleurs Rafaël Lefevre, client partner chez Meta, « quand on parle digital, on parle mécaniquement de ROI à l'échelle du national avec. Bien sûr on peut mesurer des choses incroyables, des retours sur investissement incrémentaux, mais à l'échelle du magasin, c'est beaucoup plus compliqué », reconnait-il.
Cela étant, une des pratiques sous-cotées dans le numérique, c'est la mesure des impressions, c'est-à-dire le nombre de fois que des internautes vont voir une publicité : « il faut redorer le blason de l'impression de l'affichage du display. Parce qu'en fait, rien que de voir une pub, ça a un effet sur le consommateur. Pour un magasin, avoir une idée du nombre de personnes qu'on touche et du nombre de personnes peut être qui clique sur une publicité, c'est déjà un très bon début », affirme Rafaël Lefevre.
9 magasins sur 10 jugent les réseaux sociaux comme une solution sérieuse pour la communication locale.
90 % des points de vente considèrent les réseaux Facebook, Instagram, TikTok, WhatsApp comme des solutions sérieuses à la communication locale. Ce chiffre provient d'ailleurs d'une étude menée conjointement avec l'Agence Nanotera dans le livre blanc Oui Pub : 9 mois après.
Les réseaux sociaux sont aujourd'hui des outils pour véhiculer les valeurs de l'enseigne, présenter les collaborateurs, démontre les savoir-faire, valoriser ses actions environnementales, etc : « les magasins utilisent les réseaux sociaux pour mettre en avant les collaborateurs. En revanche, Facebook, Instagram, dans leur dimension organique, ce ne sont pas le canal privilégié pour diffuser de la promo. Il faut bien séparer les deux », affirme ici Arnaud Longatte.
Ce chiffre de 90% en soi n'est pas vraiment surprenant : pratiques, accessibles, ils sont des outils qui permettent aux points de vente d'être autonome sans avoir de compte à rendre systématiquement avec le national : « on sait que les réseaux sociaux sont dans les usages de tous les Français. Les différents sondages qui ont été menés, que ce soit auprès des consommateurs ou auprès des décideurs marketing, dans la distribution, confirment ce chiffre », explique notamment Rafaël Lefevre.
Du chemin a depuis été parcouru. Autrefois craintif vis-à-vis des points de vente, les enseignes ont lâché du leste sur le sujet :
« Il y a longtemps eu une peur historique sur le sujet. Au siège, on se dit sur le terrain, il n’y connaissent rien, ils vont nous faire des créations exotiques, etc », sourit Elisabeth Cony, « finalement l'avancement des outils permet de concilier les deux. Les professionnels des magasins ont cette créativité et cette justesse pour parler du tissu local, d'activités, d'initiatives locales. C'est vraiment une richesse », assure la spécialiste. Bien entendu, il convient toutefois de respecter les codes de son enseigne pour professionnaliser cette communication.
La publicité Facebook fait mieux que l'organique
Après avoir conquis les réseaux sociaux de manière organique, l'étape d'après sur les réseaux sociaux sera d'y déployer des moyens plus importants sur le paid. Les deux outils de communication.
« Je pense que la plupart des magasins ont encore en tête que les réseaux sociaux, c'est de l'organique. C'est j'ai des fans, je veux plus de fans. Pourquoi je veux plus de fans ? Parce que je veux exposer mes messages à un maximum de monde. Si j'y expose un maximum de monde, j'ai un maximum de chance de faire venir les gens au magasin. En réalité, il y a probablement 10 à 20 fois plus de gens qui utilisent Facebook et Instagram tous les jours qui se situent autour de votre magasin. Donc il y a un énorme gap entre les deux et on peut aujourd'hui voir les réseaux sociaux sous deux angles différents. L'angle organique. J'ai des gens qui sont fans, qui sont probablement d'ailleurs déjà mes clients et qui viennent déjà toutes les semaines faire mes courses. Donc la valeur ajoutée commerciale de ces gens là, c'est plus de l'humain et leur montrer la vie du magasin. Mais j'ai aussi autour de mon magasin plein de gens qui ne sont pas forcément clients ou qui ne viennent peut-être pas si souvent et que je peux quand même toucher au travers de la publicité. Donc Facebook en tant que média ».
Les deux formes de communication diffère sensiblement. Si bien qu'en termes de résultats, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Selon la façon et le budget est utilisé, le nombre de personnes touchées peut être multiplié par 20.
Les points de vente ont donc tout intérêt à comprendre le fonctionnement de la publicité social média et à y investir du temps et de l'argent.
« Facebook est un media local puissant au service des magasins. Quand certains magasins mettent des années pour cumuler 20 ou 30K fans, une campagne publicitaire sur Facebook leur permet de toucher plusieurs dizaines de milliers de personnes a proximité de leur magasin, en quelques jours seulement »; Mathieu Lepoutre, Responsable Media 360 Auchan
Le métier de community manager en grande distribution, un rôle qui évolue naturellement vers l’activation média
Cette vision change aussi profondément le métier de community manager en grande distribution. Plutôt que de consacrer son temps sur l'organique et la création de contenu, l'enjeu de demain sera de répartir son temps vers la publicité comprenant notamment la création publicitaire, la mise en place d'un plan média, la gestion, le suivi et la mesure des campagnes.
--> Retrouvez ici Le Webinar : les enjeux de la communication locale pour la grande distribution