Le texte d'application de la loi Climat et Résilience vient de tomber. Objectif : 20% de produits sans emballage primaire dans les grandes surfaces. Entre ambition environnementale et réalités du terrain, décryptage d'une réforme qui interroge.
Un décret attendu depuis 2021
Quatre ans après le vote de la loi Climat et Résilience, le décret n°2025-1102 du 19 novembre 2025 pose enfin le cadre. Les commerces de plus de 400 m² où les produits de grande consommation pèsent au moins 5% du chiffre d'affaires devront consacrer 20% de leur surface à la vente de produits sans emballage primaire, vrac compris.
Concrètement ? Pratiquement tous les supermarchés et hypermarchés de France sont concernés.
Le choix de la méthode laissé aux enseignes
La DGCCRF, qui pilote le dossier, a voulu éviter la contrainte administrative excessive. Résultat : trois modes de calcul possibles, au choix de l'enseigne.
Première option : raisonner en surface. 20% de la surface de vente de produits de grande consommation dédiée aux produits sans emballage primaire. On compte l'emprise au sol des meubles fixes - silos à vrac, bacs, présentoirs.
Deuxième option : raisonner en chiffre d'affaires. Générer 20% du CA annuel HT sur ces produits. Une approche séduisante pour les enseignes qui ont déjà une clientèle acquise au vrac.
Troisième option : raisonner en nombre de références. Proposer 20% de l'assortiment en produits sans emballage primaire. Intéressant pour diversifier l'offre sans mobiliser des surfaces importantes.
Des exclusions qui réduisent l'ambition
C'est là que le texte devient moins contraignant qu'il n'y paraît. Pour chaque méthode de calcul, le décret prévoit des exclusions et des modulations.
Certains produits ne comptent pas du tout : ceux interdits à la vente en vrac pour des raisons sanitaires ou d'hygiène. D'autres ne comptent que partiellement : boissons alcoolisées, cosmétiques, détergents, produits d'hygiène à usage unique.
Et surtout, les emballages réemployables et les recharges sont inclus dans le calcul. On s'éloigne donc de la notion stricte de vrac pour élargir à une logique plus générale de réduction des emballages à usage unique.
Dans les faits, l'objectif de 20% se révèle moins ambitieux qu'annoncé. Une souplesse bienvenue pour les professionnels qui craignaient des contraintes ingérables. Mais qui peut décevoir les défenseurs d'une transition écologique plus radicale.
Les défis opérationnels sur le terrain
Au-delà des calculs, ce décret pose des questions très concrètes aux équipes en magasin.
La réorganisation des rayons d'abord. Impossible de plaquer 20% de vrac sur l'organisation actuelle. Il faut repenser les flux, l'accessibilité, la visibilité des produits. Dans un hypermarché de 5000 m², ça représente des centaines de mètres carrés à réagencer.
La formation du personnel ensuite. Vendre en vrac demande d'autres compétences : conseiller sur les quantités, expliquer la conservation, assurer l'hygiène des dispositifs. Des savoir-faire qu'on n'enseigne pas forcément à un employé de rayon classique.