Rayon à fort potentiel mais en perte de vitesse, la boucherie traditionnelle peine à recruter en grande distribution. Pour répondre à cette tension structurelle, F2o Formation déploie une réponse sur mesure : des écoles de bouchers intégrées aux magasins, des profils motivés, et un taux d’insertion de 80%. Un modèle qui séduit déjà E. Leclerc, Intermarché et désormais Carrefour Alma.

Un métier en tension, un savoir-faire en déclin
Derrière les vitrines réfrigérées, la réalité du métier de boucher en GMS se complexifie. Chaque année, environ 4000 postes sont à pourvoir, selon la Confédération française de la boucherie (CFBCT). Faute de candidats, de nombreux magasins ont basculé en libre-service, renonçant à un rayon pourtant stratégique. « Le boucher, comme le poissonnier ou le primeur, participe à l’animation du magasin. C’est un point d’entrée, un lieu d’échange, de conseil, qui génère du trafic et de l’attachement client », rappelle F2o Formation. Mais sur le terrain, les chefs de rayon se heurtent à une équation difficile : peu de jeunes formés, un turnover important, des difficultés à fidéliser les salariés. Résultat : des vocations qui peinent à émerger, et des directeurs de magasin souvent désabusés.
F2o : une école mobile et qualifiante, pensée pour la GMS
C’est pour répondre à ce besoin structurel que F2o a conçu une école de bouchers intégrée aux enjeux de la grande distribution. Filiale du Groupe BS, historiquement centrée sur la boucherie industrielle, l’entreprise forme aujourd’hui des bouchers pour les magasins E. Leclerc, Intermarché ou Carrefour Alma. Son modèle ? Des formations qualifiantes, sur site, de trois mois, suivies d’une période en magasin sous tutorat.
« On forme entre quatre et dix personnes par session, directement sur les sites partenaires du client, avec beaucoup de pratique : les stagiaires travaillent la viande en conditions réelles, sur les matières premières du magasin », précise la direction. Une période de 9 mois de perfectionnement en magasin sous tutorat, supervisée par des anciens bouchers passionnés devenus formateurs. « Ce n’est pas du CFA. Ce sont souvent des adultes en reconversion, de 25 à 50 ans, très motivés par le travail manuel. » Le programme repose sur l’obtention d’un CQP (certificat de qualification professionnelle), reconnu par l’État et par la branche. La formation s’étend ensuite en alternance sur plusieurs mois en point de vente, jusqu’à la prise de poste en CDI.
E.Leclerc, Intermarché, Carrefour… les enseignes qui s’engagent
Depuis 2021, F2o a ouvert six écoles de bouchers pour l’enseigne E. Leclerc. Intermarché lui a emboîté le pas en 2023, et Carrefour Alma vient de rejoindre le dispositif. Les formations se déroulent sur les sites des magasins, en partenariat avec les RH. « Nous ne formons pas seulement, nous recrutons. Nous allons chercher les bons profils, partout en France, avec un vrai travail de matching : environnement de travail, perspectives d’évolution, positionnement géographique… on construit un dossier personnalisé pour chaque binôme magasin-candidat. »
La flexibilité est au cœur du modèle. Si les locaux ne permettent pas d’accueillir une session, F2o peut déployer ses formateurs ailleurs. « C’est du sur-mesure. On s’adapte. »
Un vivier de candidats… qui attend les magasins
Contrairement aux idées reçues, la pénurie ne vient pas uniquement des candidats. F2o le constate : « On a plus de demandes que de places. Des profils motivés, prêts à changer de région pour exercer ce métier. Ce qu’il nous manque, ce sont des magasins prêts à investir. »
L’investissement, justement, est souvent surestimé. Car F2o propose une ingénierie financière : « Une formation peut coûter très cher, mais avec les aides, subventions, dispositifs type contrat de professionnalisation ou Pro-A, le reste à charge peut largement descendre. Encore faut-il le savoir. » L'OPcommerce prend en effet à sa charge 86 % de la formation. Un travail de pédagogie est mené auprès des enseignes, parfois méfiantes, souvent submergées de sollicitations commerciales.
Des résultats tangibles sur le terrain
Du côté des chiffres, le bilan est net : 100% des périodes d’essai validées, un taux d’embauche de 80 %, et des retours enthousiastes des chefs de rayon. « Nos bouchers arrivent en magasin avec un niveau équivalent, voire supérieur, à celui d’un CAP classique », affirme F2o. Un gain immédiat pour les équipes, qui profitent de profils opérationnels, formés aux attentes spécifiques de la GMS. Pour les candidats, c’est une opportunité de reconversion valorisante, rémunérée dès la formation, et assortie d’un diplôme reconnu.
Un modèle reproductible à d’autres métiers ?
Forte de cette expertise, F2o commence à étendre son modèle à d’autres secteurs. L’entreprise a récemment été sollicitée pour former des salariés à l’élevage, un autre métier en tension. « Dans dix ans, la moitié des élevages en France auront disparu si on ne fait rien. C’est une chaîne : pas d’éleveurs, pas de viande, pas de bouchers. Nous avons commencé à travailler avec des écoles agricoles pour structurer une offre équivalente. »