Dans ce podcast, David, responsable de secteur pour une marque de papeterie, partage une vision lucide et ancrée du métier de commercial terrain en grande distribution. Depuis 2010, il sillonne les magasins, suit les chefs de rayon, observe les mutations du métier et de la relation distributeur-fournisseur. Ce qu’il raconte, c’est à la fois un quotidien tendu, un métier de plus en plus exigeant, et une conviction : « Les bases du commerce vont devoir être remises un peu au goût du jour. Et ça fera du bien au business. »
Cet épisode est la suite du premier épisode avec Michael, directeur régional pour une ETI agroalimentaire, qui nous partage avec franchise sa vision du terrain.
Métiers de l'ombre, fiction documentaire au coeur du terrain
Cette fiction documentaire suit six professionnels de la grande distribution française pour révéler un secteur en pleine mutation. Basée entièrement sur des témoignages réels et écrite en collaboration avec l'intelligence artificielle, elle dévoile sans concession les transformations du commerce français : compression du temps, perte du relationnel, mais aussi remarquable capacité d'adaptation de ceux qui font vivre cette économie de proximité essentielle à notre quotidien.
Un métier qui évolue, une pression qui monte
Quand on lui demande ce qui a changé depuis ses débuts, David est clair : « Aujourd’hui, on est plus dans l’analyse qu’on ne l’était il y a encore 15 ans. Beaucoup plus d’analyse chiffre, produit, il faut être plus préparé dans les rendez-vous. » La relation commerciale n’est plus uniquement basée sur l’échange en magasin : elle repose sur des données, des plans d’assortiment, des analyses précises. Et surtout, sur une capacité d’adaptation continue : « Il faut s’adapter encore plus qu’avant, parce qu’on a de plus en plus de chefs de rayon avec des équipes incomplètes. »
Cette réalité a un impact direct sur la relation fournisseur-magasin. « Très clairement, on ne fait plus le job dans de bonnes conditions. Les chefs de rayon sont tendus, parce qu’ils n’ont pas le personnel. Soit c’est un choix économique, soit c’est subi. Mais dans les deux cas, on en subit les conséquences. » Résultat : des rendez-vous raccourcis, annulés, bâclés. « J’ai déjà eu des cas où la direction appelle le chef de rayon en pleine réunion pour lui dire de retourner en magasin. Tu serres la main, tu dis au revoir, et c’est fini. »
Cette contrainte de temps limite les échanges à l’essentiel : « Il y a plein de fois où je ne peux pas lui transmettre les infos importantes sur son marché, parce qu’il ne m’écoute plus ou parce qu’on n’a pas le temps. » Et pourtant, le commerce repose aussi sur ces moments-là : « Sur une rentrée des classes, parfois le chef de rayon me dit : ‘David, je te fais confiance’. Heureusement que j’ai cette relation avec certains. »
Le commerce à l’épreuve du chiffre, du temps et des jeunes générations
Au-delà de la pression organisationnelle, David observe aussi une évolution dans les profils des chefs de rayon : « Aujourd’hui, il faut qu’ils sachent tout faire. Un chef de rayon bazar va passer du jardin à la puériculture, du blanc à la rentrée scolaire… sans forcément être formé. » La diversité de l’offre et le rythme des saisons obligent à une agilité de tous les instants. « Et comme ils n’ont pas forcément le temps d’être formés, ils peuvent vite être dépassés. »
Il pointe aussi un changement générationnel : « Le chef de rayon qui faisait 70 ou 80 heures, qui passait sa vie en magasin, ça n’existera plus. Et c’est très bien comme ça. » Mais il insiste sur l’importance de l’organisation personnelle : « Un jeune sans expérience va vite être pris dans l’urgence et oublier ses impératifs. Il faut timer ses journées. »